Yannick et Basile sont donc arrivés par l’avion à 5h30 du matin. Après une journée de repos (jet lag oblige), juste une petite promenade nocturne où l’on découvre l’art mis au niveau des gens et puis un petit souper chinois.
Catégorie : vie quotidienne
Ces gens-là – 11 – Education
C’est parti pour trois semaines de blocus ici… Non pas uniquement pour les étudiants universitaires… Pour tous, de la maternelle aux secondaires. La pression est tellement forte dans le système éducatif que les enfants ne jouent presque plus en cette fin de période scolaire et se préparent pour les examens. Qu’ont-ils a y gagner? Les meilleurs sont repérés par le parti et deviendront membres de celui-ci, un grand honneur au service de la patrie ou du parti (il n’y a qu’une inversion et une lettre de différence…)
Des tests de QI sont également organisés pour les ados. Ceux qui dépassent un certain seuil (élevé genre 140) voient leur éducation (chère pour l’ensemble de la population) prise entièrement en charge par le parti. Ils formeront donc les cadres de demain.
Cela pose notamment deux questions :
- Comment un futur Trump, par exemple, ou un Georges W. Bush junior, qui sont de notoriété publique bas de plafond, pourront-ils négocier avec ces gens-là particulièrement intelligents ?
- Leur intelligence supérieure se laissera-t-elle bernée par la propagande ou deviendront-ils la génération qui changera les choses ?
Ces gens-là – 9 – Manger
Et oui, je reviens encore sur cette problématique soulevée par Salomé, le rapport de ces gens-là avec la nourriture. Pourquoi encore y revenir ? Simplement parce que j’ai été manger dans un restaurant belge ici.
Bon, pas n’importe quel restaurant, le « Morel’s », un petit lunch entre compatriotes de la Délégation. Alors le Morel’s est tenu par Renaat Morel qui vit ici depuis 26 ans mais avant cela, il fut chef dans plusieurs palaces 5 étoiles dans notre vieille Europe et en Asie. Par contre, ici, ce n’est pas du tout un 5 étoiles mais un restaurant vraiment belge. On s’en sort pour une quarantaine d’euros avec boisson (bières belges) et dessert. Ce qui a poussé Renaat, c’est la Huis Istas à Jezus-Eik, où je me souviens avoir mangé des tartines au fromage blanc en revenant de week-ends dans les Ardennes. Renaat voulait une cuisine authentique dont le menu n’a guère changé depuis 20 ans (alors que la Chine aime le changement notamment dans les menus des restaurants). Mais le succès est là pour Renaat et son restaurant ne désemplit pas.

Alors, pourquoi j’en parle ? Parce que ce monsieur parle à ses clients et nous racontait qu’un jour il a fait la remarque à un de ses riches clients d’ici en lui disant qu’il commandait trop, beaucoup plus qu’il ne pourrait manger et donc que le restaurant devrait jeter pas mal de nourriture non consommée (PS: la plupart des restaurant offre quand même la possibilité de prendre un « doggy bag »). Le client a simplement répondu: « c’est qui qui paye ? ».
Donc, le rapport à la nourriture est aussi lié à un rapport à la richesse : je montre ma richesse en commandant plus que de raison au restaurant. Personnellement, je vois là encore une sorte de traumatisme des périodes de famines, somme toute pas si anciennes, gravé dans l’inconscient collectif.

Cette semaine, une article de Vent de la Chine (un site francophone de très bonne analyse locale), confirmait encore le problème du surpoids dans le pays lié à l’urbanisation (passée de 16% à 65% depuis les années 60) et au changement de régime alimentaire.
Au fil des siècles et jusque dans les années 1980, le régime alimentaire du pays était centré sur la consommation de grains (essentiellement riz et racines amylacées comme la patate douce dans le sud, blé et millets dans le nord, ainsi que des légumineuses sèches) et de légumes, complémentés en plus petites quantités de produits animaux variés (porc, poulet, mouton, chèvre, poisson, etc.) et d’apports lipidiques limités. [..]

Avec l’ouverture économique de la Chine par Deng Xiaoping, les consommateurs chinois sont passés en quelques années d’une alimentation avant tout végétale à une alimentation beaucoup plus omnivore où la part animale, produits laitiers inclus, est devenue quasi-quotidienne et très significative. [..] Ainsi la Chine consommerait aujourd’hui deux fois plus de viande que les États-Unis, d’après le Earth Policy Institute [..].
Selon cet article, depuis 1997, la consommation de certains produits a augmenté de manière phénoménale : les produits laitiers de 1008%, la restauration rapide et le « snacking » de 787% et les sodas sucrés de 1959%.
Ces gens-là – 10 – Le regard de l’autre
Donc, j’ai passé une (trop) courte semaine de congé avec Yannick et Basile qui son venus découvrir ce qui est maintenant une partie de mon univers (et leur résidence secondaire 🙂 ).
Quelque chose nous a tous les trois frappés dès notre première visite sur la place T. et à la Cité interdite : nous sommes des bêtes curieuses pour ces gens-là. Un peu comme s’ils n’avaient jamais vu de gens de type eurasien en vrai (ils en voient à la télé ou dans les films et séries). Plusieurs fois nous sommes surpris par un regard inquisiteur voire un peu malsain par son insistance. Pas mal de gens font également des photos de nous de manière plus ou moins cachée. Ou alors, ces trois adolescentes qui nous demandent par signes si nous voulons bien faire une photo avec elles. Grand sourire en retour, elles vont certainement gagner des followers sur leurs réseaux sociaux…
La semaine d’avant, j’avais fait un excursion avec notamment un noir (canadien mais d’origine ivoirienne et sénégalaise … excusez du peu, et qui fait une thèse à l’université de Gand – oui, oui, en Belgique – sur la question du genre dans les media d’Afrique sub-saharienne…) et nous avons un peu échangé sur le sujet qui le touche particulièrement, les noirs étant ici beaucoup, beaucoup moins nombreux que les eurasiens qui sont déjà peu nombreux.
Analyse simpliste : ces gens-là n’ont pas l’habitude de voir des étrangers (sauf dans le quartier où j’habite qui est un quartier d’ambassades et d’expats). Même les média (TV et média sociaux) ne semble pas transmettre beaucoup d’images d’étrangers. Le fait d’en voir « en vrai », pour eux est devenu quelque chose d’exceptionnel et très certainement, ceci a été accentué par les 3 ans de lockdown durant lesquels le pays est vraiment resté fermé sur lui-même.
Deux remarques encore :
Cela relativise pas mal le point de vue de faire partie de la minorité. J’avais déjà vécu cela deux fois, lors du mariage d’un collègue et ami noir, en Belgique où nous étions 4 ou 5 blancs dans la grande salle mais le tout dans une bienveillance festive; lors d’un mission en Tanzanie où, malgré la bienveillance, j’étais considéré comme le blanc riche et donc il y avait une certaine convoitise dans le regard et un regard intéressé (du genre « on lui prendrait bien quelques dollars à celui-là »). Ici, la bienveillance est beaucoup moins présente et le regard peu discret et inquisiteur.
Tant qu’à parler d’un aspect plutôt psycho-social, un autre élément quelque peu étrange de ces gens-là est leur individualisme : je pense d’abord à moi, je passe avant dans les files (à pied ou en voiture), je ne vois pas (veux pas voir) que tu fais une photo et je passe en force… Bizarre dans un pays qui se marque comme un dernier bastion du communisme…
Ces gens-là – 8 – Les loisirs
Je me suis déjà un peu posé la question des loisirs, me demandant si, en dehors de leur smartphone, les gens d’ici ont des loisirs. Ma petite balade d’aujourd’hui m’a permis de confirmer quelques observations.
Dans les lieux publics, ce sont essentiellement les adultes qui ont des occupations de loisir. Voici quelques éléments :
- Dans la petite rivière près de mon appartement de nombreux pêcheurs pèchent :

- Que font ces braves messieurs sur ce pont d’un grand boulevard avec une espèce de bobine de ficelle et les yeux rivés au ciel ? Ils gèrent leur cerf-volant (tout petit triangle au dessus de la barre sur la deuxième photo). A vue de nez, ceux-ci se trouvent à plusieurs centaines de mètres d’eux…


Enfin j’ai découvert un nouveau sport : le plumfoot ou Jianzi. Il consiste à garder en l’air un volant en utilisant les pieds et d’autres parties du corps, hormis les bras et les mains. Le volant en question est un peu plus gros que notre volant de badminton. Je l’ai vu joué à deux, 3, 4 ou plus. Il donne parfois lieu à certaines figures de style dignes d’un Pelée sur une reprise de volée…

Ces gens-là – 7 – superstitions, nombres et couleurs
Les gens d’ici sont extrêmement superstitieux ou en tout cas le furent.
Les nombres
Bon, chez nous on connaît la numérologie et certaines et certains y croient mais elles et ils sont sans doute une toute petite minorité. Ici, c’est le contraire, tout le monde croit en le pouvoir des nombres. Et cela remonte assez loin.
Un premier exemple:
Sur certaines photos que je publie (ou que vous pouvez voir ailleurs sur le net et dans les livres – oui, il n’y a pas que le net…) vous pourrez remarquer les petites représentations, le plus souvent animales, sur les coins des toitures anciennes.

Outre leur utilité architecturale (il s’agit du sommet d’une espèce d’aiguille qui s’enfonce dans le toit pour maintenir celui-ci), ces statuettes ont une signification symbolique forte.
Leur nombre d’abord, puisqu’on en parle. Plus il y en a, plus la personne qui vit dans ce bâtiment est importante. Ci-dessus, il y en a onze, nombre de l’empereur… De plus chaque animal symbolise quelque chose: dragon (symbole de l’empereur, force, suprématie, …), le phénix (paix et prospérité), le lion (force, bonheur), la chauve-souris (chance), etc.
Revenons aux nombres et aux chiffres. Le plus souvent, la signification symbolique d’un chiffre est lié à sa sonorité proche d’un autre mot.
Le 9 est un symbole de perfection et d’harmonie et d’éternité. Les amoureux s’offrent parfois 99 fleurs…
Le 8 est le chiffre porte chance par excellence par sonorité (Bā – 八 ) proche de Fā 发 qui signifie Richesse ou Fortune. Les Jeux Olympiques furent inaugurés le 8 août 2008, à 8h08 du soir !
Le 7 est le chiffre de l’harmonie des 5 éléments (voir ci-dessous) plus le Yin et le Yang.
Le 6 est le « petit » chiffre porte bonheur (par rapport au 8) car sa sonorité est proche du verbe s’écouler, d’où l’idée que la vie s’écoule paisiblement.
Le 5 est le chiffre de la stabilité, des 5 éléments: feu, terre, eau, bois et métal.

Le 4 est le chiffre porte malheur par excellence. Ainsi, dans de nombreux bâtiments, même s’il y a cinquante étages, il n’y a pas de 4 ou de 14 ou de 24*. Simplement parce que la prononciation de 4 (Si) est proche de la prononciation du mot mort (Sǐ), seul l’intonation change.
- *A propos, ne chercher pas le niveau 0, le rez-de-chaussée. Ici il porte le numéro 1. Et donc, dans ce genre de bâtiments, si vous devez aller au 5ème, en fait vous vous vous retrouver au 3ème occidental : on commence à compter à 1 (et pas à 0) et on enlève le 4… Vous suivez ?
Le 3 est le « petit » chiffre porte malheur (moins grave que le 4).
Le 2 est un chiffre positif représentant la dualité mais par elle, la vie.
Les couleurs
Beaucoup à dire sur les couleurs. Mais intéressons nous au cinq couleurs de bases pour les gens d’ici: le rouge, le jaune, le vert, le blanc et le noir.
Le rouge pour le feu (火), couleur par excellence du pays, représente la force, la richesse, la bonne fortune au sens propre et figuré. Une mariée, pas encore trop touchée par la mode occidentale, privilégiera une robe rouge.

Le jaune pour la terre (土), était la couleur de l’empereur, est encore la couleur de la richesse et de la noblesse mais aussi, depuis moins longtemps, celle du sexe et de la pornographie…
Le vert pour le bois (木), est la couleur de la fertilité, de la propreté, de l’harmonie mais aussi, dans certains contextes, de l’infidélité. L’expression « porter un chapeau vert » signifie être cocu… Vous voilà prévenues et prévenus.
Le blanc pour le métal (金) est le symbole de la pureté mais aussi de la mort (moins aujourd’hui à cause de l’influence occidentale notamment au niveau de la mode pour les robes de mariées).
Le noir pour l’eau (水) représente la sobriété, la stabilité et le pouvoir (regardez bien les costumes du président…). Pas le bleu pour l’eau ? Et bien non, le bleu est considéré comme une nuance de vert. Rappelons que le bleu, dans nos contrées n’a été réellement représenté et nommé qu’à partir du Moyen Age…
Ex cursus tiré de différents ouvrages de Michel Pastoureau, grand (et passionnant) historien des couleurs.
En latin ou en grec ancien, le ciel et la mer sont rarement qualifiés de bleus. En grec ancien, l’adjectif kyaneos qualifie aussi bien le bleu des yeux que le noir des vêtements de deuil. Et glaukos, qui indique une idée de pâleur, s’applique aussi bien au bleu des yeux, qu’au vert des feuilles ou au jaune du miel. On ne nommait la couleur des phénomènes naturels que sur un plan métaphorique. Le ciel est blanc, rouge ou noir, selon la façon dont il agit sur la vie des hommes. Dire qu’il est bleu n’a pas de sens. Chez Homère, on trouve très peu d’adjectifs de couleur, mais beaucoup d’adjectifs de luminosité (clair, sombre, gris, …). Même chose dans la Bible où on est très attentif à l’éclat, la brillance, la matité. C’est une constante des sociétés anciennes occidentales mais également orientales comme nous venons de le voir.
La promotion du bleu en Europe se serait faite grâce à trois agents : les figurations de la Vierge Marie, mère de Jésus, le roi de France et la morale.
Jusqu’au XIIème siècle, la Vierge est habillée en sombre: noir, vert, bleu. L’idée est qu’elle porte le deuil de son fils. A la fin du XIIème, le bleu s’éclaircit et élimine les autres couleurs. On arrive aux Vierges gothiques, toutes de bleu vêtues.
A partir du XIIIème siècle, ce sont les rois qui commencent à s’habiller de bleu. Et particulièrement le roi de France, parce qu’il a du bleu dans ses armoiries (d’azur semé de fleurs-de-lis d’or). Le premier à s’être habillé en bleu, aurait été St-Louis (Louis IX). Charlemagne ne l’aurait jamais fait. Il s’habillait en rouge et vert, le couple de couleurs le plus fréquent pour l’aristocratie.
Enfin, la morale s’en est mêlé. A la fin du Moyen Age, apparaît l’idée qu’il y a des couleurs honnêtes – noir, blanc, gris, brun, bleu – et des couleurs « déshonnêtes » – jaune, vert, rouge. Cela s’inscrit dans le grand courant moralisateur qui traverse la fin du Moyen Age et que la Réforme protestante récupère. Les grands réformateurs protestants ont une haine pour les couleurs vives. A partir du XVIème, le rouge qui occupait une place important (les hommes s’habillaient très souvent dans cette couleur), connaît un recul considérable et définitif. Et le bleu devient une couleur morale, un statut qui favorise sa diffusion, dans l’Europe protestante d’abord, dans l’Europe catholique ensuite.
Traditions
Une tradition : les costumes traditionnels pour aller visiter les lieux importants (comme la Cité interdite).
Ce ne sont pas des acteurs mais des gens comme vous et moi (en fait pas trop comme moi…) soit qui viennent faire leur photos de mariage en costume (avant d’aller rendre le costume au loueur puis fêter le mariage en tant que tel avec famille et tout), soit qui viennent faire des photos tout simplement.
Attention fantômes
Les gens d’ici croient aux fantômes et à d’autres esprits malfaisants. Il y a essentiellement deux fantômes qui font peur aux petits enfants : le fantôme noir et le fantôme blanc. Ils passent par les miroirs donc ne mettez pas un miroir en face de votre lit : en baissant votre garde quand vous dormez, ils pourraient s’infiltrer…
Les seuils des portes des palais et maisons les plus anciennes sont hauts pour justement que les fantômes trébuchent dessus. Plus le seuil est haut, plus le personnage qui vit dans le bâtiment est important… et ne vous avisez pas de marcher sur le seuil, il faut l’enjamber.
Ces gens-là – 6 – Le clavier d’ici (2) et éducation
Suite d’un précédent articulet où je m’étais posé la question de l’écriture de cette langue sur nos bons petits claviers QWERTY (à priori Windows n’a pas prévu cela pour les claviers AZERTY), j’ai continué mes investigations et je peux maintenant écrire en chinois sur mon ordinateur également.

Les préférences de langues de Windows permettent d’installer puis de de sélectionner plusieurs claviers dont le clavier Chinese (Simplified, China) Microsoft Pinyin.
Une fois installé, c’est celui-ci qu’il faut activer. Ensuite ? Et Bien c’est tout simple, on commence à écrire en Pinyin… (Rappelez vous, le Pinyin est une translittération du chinois en alphabet latin).
Un petit exemple ?
Dans MS Word, par exemple, je tape ce que je veux écrire en Pinyin. Le système coupe lui-même les « syllabes » (avec une apostrophe). L’ordinateur me propose une série de translittérations. Je n’ai plus qu’à appuyer sur la touche « 1 » si je veux écrire la première proposition (et c’est bien comme cela qu’on écrit le nom de la capitale dans l’exemple ci-dessous) ou la touche « 2 », etc.
Voici ce qui se passe sur mon document Word:

Il suffit de maîtriser le Pinyin…
Et donc la question suivante: elles et ils doivent toutes et tous apprendre le Pinyin ? Et oui et première réponse à une question posée par Dominique : ça commence dès la maternelle.
En fin de maternelle (trois sections à partir de 3,5 ans/4 ans) les enfants sont censés savoir déjà lire en partie, les caractère de base, un caractère à la fois (et leur translittération en Pinyin). Les années de primaires servent à augmenter le vocabulaire et les combinaisons de caractères. Donc dès la fin des maternelles et surtout la fin des primaires, les petits enfants chinois sont bilingues chinois-pinyin à la lecture et puis à l’écriture.
(à suivre…)
Ces gens-là – 5 – Streetfood et Malbouffe
Salomé réagissait sur Insta à une photo du premier Pizza Hut de la capitale, posant des questions pertinentes sur le rapport à la nourriture, l’obésité, la malbouffe, la street food… Alors décortiquons un peu cela.
Remise en contexte
Petit rappel historique (qu’un guide n’a pas manqué de nous faire) : ce jeune homme (le guide) d’une petite quarantaine d’année, a eu des grandes-tantes et grands-oncles qui sont morts de faim (pas son grand-père sinon il ne serait pas là pour le raconter… mais il y eu notamment des grandes famines dans les années 60). On peut reconnaître au régime actuel (au sens politique du terme 🙂 ) qu’il a fait en sorte de mettre de côté (définitivement ?) les problèmes de famines récurrentes.
Par contre, l’augmentation du niveau de vie et son occidentalisation font passer de plus en plus la population d’un régime majoritairement végétarien (et relativement sain) à un régime plus carné (et je ne parle plus de régime politique !). Mais cette évolution est assez récente (une dizaine d’années ou un peu plus).
Enfin, la situation que je décrirai ici correspond à une ville, la capitale, essentiellement avec une population plus aisée que la campagne (mais moins autonome au niveau nourriture).
Il y a, à ma connaissance et d’après ce que j’ai pu glaner, peu de réglementation sur la nourriture. On est loin de l’AFSCA, du tout bio (ça commence, ça commence mais très petitement) et donc, il n’est, par exemple, pas obligatoire d’indiquer les taux de sucre et autres lipides sur les emballages. Certains produits typiquement chinois ont d’ailleurs un emballage très épurés…
La Street food
Dans la capitale, le street food a été quasiment aboli (pas convenable, signe de pauvreté) mais il est encore présent dans d’autres villes. Cependant, qui dit street food ne dit pas forcément malbouffe. Dans la petite ville forteresse où j’ai été, les street foods proposaient uniquement des patates douces grillées… relativement sain, on peut en convenir.
Pour le reste, de ce que j’en ai vu, en street food, il y a pas mal de dim sun (genre de raviolis bouillis ou frits), des pains ou des pâtisseries peu sucrées, aussi pas mal de friture, évidemment, des brochettes de viande, de poulpe, de poisson ou de bonbons.
Je le disais, la réglementation doit encore venir (ou pas !). Petite anecdote sur le sujet : en passant devant un petit étal de street food vendant des brochettes, je remarque que le vendeur sort un bloc de brochettes surgelées et, pour pouvoir les décoller les unes des autres, il les tape simplement… sur une pierre du trottoir… Bon, les trottoirs sont relativement propres mais quand même…
La malbouffe occidentale
La malbouffe occidentale (McDo, KFC, Burger King, Pizza Hut et autres Domino’s pizza) a fait son apparition, au début très timide, il y a une petite trentaine d’années (premier KFC en 1987, premier McDo en 1990) et, en 2020, il n’y avait encore que 3300 McDo pour une population d’1,8 MILLIARDS d’habitants (1 McDo par 550 000 habitants !)…
Les menus sont en partie adaptés au pays : on peut trouver chez McDo un bol de riz avec des chicken dips, un burger à la saucisse (German Sausage Double Beef Burger – les gens d’ici semblent adorer les saucisses allemandes), un style de porridge de riz appelé congee, etc.
La malbouffe est donc bien là et ses acteurs ne désemplissent pas (ou les livreurs n’arrêtent pas d’aller et venir).
Quelques autres aspects liés à la nourriture
La livraison. La livraison est un vrai sport national sans doute largement dû au Covid et donc tout le monde se fait livrer partout tout (pas uniquement de la nourriture, je peux me faire livrer des Lego – ou leurs imitations 10 à 100 fois moins chère ou n’importe quoi d’autre. C’est Amazon en cent fois pire). J’ai un peu du mal avec le concept : se faire livrer un café Starbucks ? Il doit être froid à l’arrivée ! Et donc beaucoup de gens se font livrer des repas tout faits. Il y a sans doute des niveaux de qualité très différents mais généralement, un repas tout fait n’est pas aussi sain qu’un repas fait maison avec les légumes du jardin (ah oui, il n’y a pas de légume du jardin dans la capitale car il n’y a pas ou peu de jardins… mais on peut trouver des fruits et légumes dits « bio »)
Au restaurant. Les restaurants sont souvent bien remplis et relativement bon marchés (bon, il y a toujours moyen de trouver plus cher !). Dans le coin où je suis (un coin avec beaucoup d’expats), on peut bien manger (entrée, plat, boisson – thé ou soda) pour l’équivalent de moins de 20 EUR. Par contre, ce qui est frappant, c’est combien les gens d’ici peuvent manger ! Des quantités qui me semblent colossales comme une assiette de saucisse de 600 gr. Bon généralement les gens d’ici partagent : on prend plusieurs plats et on mange ensemble dans les différents plats. Donc la saucisse dont je parlais s’accompagne d’une choucroute (complète avec sa viande, évidemment !) et pourquoi pas de quelques brochettes… pour 3 personnes.
PS: L’histoire de la saucisse vient de ce que j’ai vu dans une brasserie, à côté du bureau, créée par un Est-allemand et tenue aujourd’hui par un Polonais…
Manger est un élément culturellement important. Je regardais un film québéco-chinois (TV5 Monde, la seule chaîne francophone à la télé) et la grand-mère n’arrêtait pas de proposer à sa fille de manger, comme si c’était vital pour elle (oui, c’est un peu vital mais là, ça poussait à l’obsession). Et en fait, c’est comme cela dans la vraie vie : ces gens-ci vous poussent à manger plus que de raison. Reflet d’anciens traumatismes de famines ancrés dans l’inconscient collectif ?
Obésité et surpoids ?
Oui, depuis 2020, plus de la moitié de la population chinoise est en surpoids. Premières victimes ? Les plus jeunes, et essentiellement les jeunes garçons. En cause ? Ce changement de régime (pas encore politique 🙂 ) du végétarisme au carné, avec les travers de la malbouffe à l’occidentale (à l’américaine surtout, plus qu’à l’européenne… sauf la saucisse allemande 🙂 ) et surtout un mode de vie inadapté. Les parents travaillent comme des acharnés et les enfants sont livrés à eux même et se jettent sur le mode de vie occidental via la nourriture notamment (la mode aussi). Le manque d’activité physique des enfants est également en cause ainsi que l’abus de soda (jusqu’à 2 litres par jour !). Je le signalais dans un précédent article mais le week-end au parc, on voit des adultes promener avec des petits enfants, d’autres petits (5-7 ans) faire du sport mais très peu d’enfants au-delà de cet âge au parc… Et effectivement les jeunes garçons sont plutôt enveloppés…
Alors pourquoi les garçons plus que les filles ? Il y a toujours cette préférence de l’enfant mâle (dysfonctionnement de la fameuse politique de l’enfant unique) mais il semble aussi que dans l’imaginaire collectif, le corps d’un mâle doit en imposer plus. Regardez certains modèles qu’ils ont eu : empereurs et mandarins sont rarement maigres (sauf l’empereur dans le dessin animé Mulan !).
Comme d’habitude dans mes articulets, ceci n’est qu’un point de vue, de ce que j’observe et ce que je recueille comme info et n’a pas valeur d’étude scientifique sociologique…
Ces gens-là – 4
Un clavier chinois
Question existentielle que je me posais depuis longtemps : comment les gens d’ici utilisent le clavier ? Ce n’est pas possible qu’ils aient des claviers avec 4000 caractères…
Commençons par ce que tout le monde a ici : le smartphone. J’ai installé sur mon iPhone* un clavier « chinois simplifié »**.
*Précision: non, je n’ai pas viré ma cutie : je déteste toujours Apple mais ici l’iPhone est quasi indispensable car on n’a pas accès aux outils Android et toutes les applications indispensables à la vie ici sont sur le Market Place de Apple. Donc avant de partir, j’ai acheté un petit iPhone SE (2020) reconditionné (en Europe) pour moins de 200 EUR.
**Le chinois simplifié : durant le XXème siècle et essentiellement depuis 1956, en plusieurs étapes, les caractères chinois ont connu une version simplifiée. Dès 1922, Qing Xuantong (1887-1939), phonéticien, propose les huit règles qui mèneront à la simplification. Je les reprends ici de wikipedia :
- Simplifier un symbole complexe par un symbole facile à écrire
- Simplifier un élément et le simplifier dans tous les caractères qui l’utilisent
- Remplacer la partie phonétique d’un idéophonogramme
- Normaliser la graphie de l’écriture cursive
- Regrouper des homonymes
- Tronquer une partie d’un caractère traditionnel
- Inventer des idéogrammes composés
- Ne garder que le contour d’un caractère traditionnel
A côté de cela, en 1958, est publié l’alphabet Hanyu PinYin, une translittération « officielle » du chinois en caractères latins. Il était voué à remplacer totalement les caractères chinois mais la réforme ne prend pas et donc le pinyin sert essentiellement d’ « alphabet » phonétique.
Après ces petits détours, revenons à ma question: comment les chinoises et les chinois utilisent les technologies modernes pour écrire dans leur langue aux milliers de caractères ?
Et bien, sur leur smartphone, ils utilisent un simple clavier QWERTY (le clavier classique pour les anglophones). Ils écrivent en pinyin et, magie de la technologie, le smartphone leur proposent le ou les caractères correspondants en chinois. Il leur suffit de cliquer dessus pour écrire leur message…
Petit exemple avec mon prénom chinois:

Mon prénom en pinyin c’est YiFu que je tape gentiment avec le clavier QWERTY. Le programme me propose diverses options (car il n’entend pas les accents) et je n’ai plus qu’à cliquer sur la bonne option pour écrire mon prénom en caractères chinois.
A propos, j’ai une carte d’identité chinoise avec un nom chinois:
YiFu Boyan
qui veut dire quelque chose comme « Yves, celui qui veut continuer à apprendre »… Pas mal trouvé. La carte d’identité est obligatoire pour les résidents. Le nom m’a été proposé par un site qui demandait quelques critères comme le nom « européen », le sexe, l’âge, … C’est la première proposition qui m’a été faite par le site…
Je dois encore analyser comment tout ceci fonctionne avec un ordinateur car, je suis bien placé pour le savoir, nous n’installons rien de spécial sur leurs ordinateurs pour les agents locaux au boulot… Ils ont des simples laptops Lenovo (chinois, quelle ironie) à l’européenne.
(à suivre…)
Ces gens-là – 3
La faune de la capitale
Nous sommes en hiver et la capitale en question est une énorme ville assez polluée. Pourtant quelques animaux y vivent.
Les oiseaux
Certaines et certains d’entre vous savent que j’aime dessiner les oiseaux (mais mon container avec mes affaires de dessin vient seulement de quitter le port d’Antwerpen donc je n’en dessinerai pas avant 1 mois et demi d’ici !). Et donc, je m’intéresse à eux un peu (mais je suis loin d’être un ornithologue). En cet hiver je découvre quelques oiseaux qui semblent courants dans la capitale (les photos ne sont pas de moi !) :
- La pie orientale (pica sericea), très semblable à notre pie commune ou pie bavarde (pica pica), est très présente dans son plumage noir et blanc aux reflets bleus. Malheureusement, c’est un oiseau très territorial qui en fait fuir beaucoup d’autres. Par contre, c’est sans doute un des oiseaux les plus intelligents.
- La pie bleue à calotte noir (cyanopica cyanus) qui, au moins pour celles que j’ai vues, est plus grise que bleue, est également très présente et semble moins farouche que sa cousine du point précédent.
- Le corbeau est aussi fort présent (il dispute sont territoire avec la première pie).
- Des moineaux communs par petites bandes.
- Le bulbul de Chine (picnonotus sinesis) que j’ai cru apercevoir un instant près de l’ambassade de Belgique.
- Et encore quelques merles, très peu de pigeons et j’ai entendu un coucou.
J’ai lu dernièrement un roman d’un auteur portugais relativement connu pour ses romans très documentés sur des aspects scientifiques : José Rodrigues Dos Santos (La Fortune de Dieu, L’Ultime secret du Christ, le magicien d’Auschwitz, …). Dans ce roman, Âmes animales, outre qu’on a envie de devenir végétarien en le lisant, il y a certaines réflexions sur le langage des animaux : dans une même espèce, il a des dialectes différents. Et j’ai pu le vérifier par moi-même : les corbeaux d’ici ne croassent pas comme les corbeaux chez nous : le « r » du « croâ – croâ » semble avoir disparu dans ce dialecte-ci, ce qui donne un son moins rude et plus doux.
Les quadrupèdes
Ce n’est pas en ville qu’on voit beaucoup d’animaux mais deux petites remarques :
Oui, les gens d’ici ont des chiens et on voit, très régulièrement, des gens promener leur chien. Jusqu’à présent, je n’ai vu que des petits chiens (taille caniche).
Il y a des chats partout et les gens les adorent : il nourrissent les chats « errants » et les prennent en photo.