Ces gens-là – 10 – Le regard de l’autre

Donc, j’ai passé une (trop) courte semaine de congé avec Yannick et Basile qui son venus découvrir ce qui est maintenant une partie de mon univers (et leur résidence secondaire 🙂 ).

Quelque chose nous a tous les trois frappés dès notre première visite sur la place T. et à la Cité interdite : nous sommes des bêtes curieuses pour ces gens-là. Un peu comme s’ils n’avaient jamais vu de gens de type eurasien en vrai (ils en voient à la télé ou dans les films et séries). Plusieurs fois nous sommes surpris par un regard inquisiteur voire un peu malsain par son insistance. Pas mal de gens font également des photos de nous de manière plus ou moins cachée. Ou alors, ces trois adolescentes qui nous demandent par signes si nous voulons bien faire une photo avec elles. Grand sourire en retour, elles vont certainement gagner des followers sur leurs réseaux sociaux…

La semaine d’avant, j’avais fait un excursion avec notamment un noir (canadien mais d’origine ivoirienne et sénégalaise … excusez du peu, et qui fait une thèse à l’université de Gand – oui, oui, en Belgique – sur la question du genre dans les media d’Afrique sub-saharienne…) et nous avons un peu échangé sur le sujet qui le touche particulièrement, les noirs étant ici beaucoup, beaucoup moins nombreux que les eurasiens qui sont déjà peu nombreux.

Analyse simpliste : ces gens-là n’ont pas l’habitude de voir des étrangers (sauf dans le quartier où j’habite qui est un quartier d’ambassades et d’expats). Même les média (TV et média sociaux) ne semble pas transmettre beaucoup d’images d’étrangers. Le fait d’en voir « en vrai », pour eux est devenu quelque chose d’exceptionnel et très certainement, ceci a été accentué par les 3 ans de lockdown durant lesquels le pays est vraiment resté fermé sur lui-même.

Deux remarques encore :

Cela relativise pas mal le point de vue de faire partie de la minorité. J’avais déjà vécu cela deux fois, lors du mariage d’un collègue et ami noir, en Belgique où nous étions 4 ou 5 blancs dans la grande salle mais le tout dans une bienveillance festive; lors d’un mission en Tanzanie où, malgré la bienveillance, j’étais considéré comme le blanc riche et donc il y avait une certaine convoitise dans le regard et un regard intéressé (du genre « on lui prendrait bien quelques dollars à celui-là »). Ici, la bienveillance est beaucoup moins présente et le regard peu discret et inquisiteur.

Tant qu’à parler d’un aspect plutôt psycho-social, un autre élément quelque peu étrange de ces gens-là est leur individualisme : je pense d’abord à moi, je passe avant dans les files (à pied ou en voiture), je ne vois pas (veux pas voir) que tu fais une photo et je passe en force… Bizarre dans un pays qui se marque comme un dernier bastion du communisme…

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