Ces-gens-là – 19

LGBTQ etc…

J’ai enfin eu une discussion avec un de mes collègue sur la situation des communautés LGBTQ etc… dans ce pays.

Avant l’arrivée du Grand Leader actuel, il y avait eu une certaine ouverture mais elle est bien loin maintenant. Le mot d’ordre du régime est bien make this pays great again… (tiens tiens, de l’autre côté du Pacifique on a déjà entendu la même chose). Et donc en ritournelle la revanche contre l’Occident (par rapport au XIXème siècle !), prendre sa place de grande puissance, … Puissance, parlons-en. Un discours machiste et militariste est asséné aux garçons depuis leur plus tendre enfance et relayé par tous les média, bien entendu.

Et donc, ceci explique encore la place prépondérante des garçons et le désir de beaucoup de couples qui souhaitent (et qui peuvent financièrement assumer)* des enfants d’avoir un garçon. Ce machisme d’État, accompagné d’une puissante distinction des rôles entre la femme et l’homme, fait que tous les modèles de genre déviants de la norme (déviant au sens propre du terme, pas au sens négatif !) sont extrêmement mal perçus particulièrement dans les milieux ruraux. C’est une honte pour des parents d’avoir un garçon homosexuel ou qui désire changer de genre. En ville, ce phénomène est un peu moins marqué parce que souvent les gens qui travaillent et vivent en ville vivent loin de leurs parents (une majorité des p3kinois n’est pas p3kinoise d’origine). Les filles, on s’en fout un peu plus, c’est moins important, du moment qu’elles fassent des petits-enfants (mâles).

Et l’État dans tout cela ?

L’État accepte le changement de genre à l’état civil pour autant que le processus physique ait été jusqu’au bout (ablation des organes, …). Les couples homosexuels ne sont pas du tout reconnus (mais pas non plus réprimés). Ce qui est réprimé, c’est l’associatif lié à ces communautés : les associations des communautés LGBTQ… Si elles sont éventuellement tolérées, elles sont sous très étroite surveillance dans la crainte d’une sorte de prosélytisme (fantasmé) qui irait tout à fait à l’encontre des idéaux du Parti d’un pays fort, machiste, militariste…

Au niveau culturel, les références à l’homosexualité sont bannies. Ainsi, les allusions à l’homosexualité de Dumbledore dans le film Les Animaux fantastiques : Les Secrets de Dumbledore, ont été coupées dans la version chinoise du film.

A propos de machisme, à la tête de l’État et du Parti (c’est souvent globalement la même chose), même si pour le moment on ne s’y retrouve plus très bien (il y a une valse des ministres et hauts responsables pour l’instant…), très peu de figures féminines (2 sur 37 au niveau des secrétariat d’État et des ministres – une conseillère d’État et la ministre de la Justice). Le Parti, de son côté, a souligné à plusieurs reprises l’importance des femmes, mais leur rôle dans la direction politique reste très limité : il n’y a qu’une seule femme dans le Politburo, le deuxième organe le plus important, qui compte 25 membres.

  • * Une étude récente de l’Institut de recherche démographique YuWa indique que ce pays est, en termes relatifs (salaire, …) le plus cher du monde pour élever (et éduquer) un enfant… (538 000 yuans/an de 0 à 17 ans soit environ 71 750 EUR/an).

Un prélude de Bach

Un frisson ou une larme à l’écoute d’un Aria de Bach ou d’un Requiem de Mozart ou de Fauré, un sourire ou autre souvenir au son des Quatre saisons de Vivaldi… Attention, danger ! Attention car malgré une certaine universalité de ces musiques dites « classiques », ce sont des musiques religieuses (Vivaldi était prêtre catholique) et donc gare au prosélytisme religieux.

Et donc, en tant que telle, la musique de Bach ou de Vivaldi n’est pas interdite ici mais voici ce qui peut arriver…

Un de mes collègues expat chante dans une chorale ici qui prépare un concert de la Passion selon Saint Jean de Bach. Ils pourraient facilement remplir un auditorium d’un millier de personnes pour ce concert mais ils préfèrent se limiter à l’auditorium « privé » de l’école allemande qui ne compte que 250 places. Leur cheffe, une chinoise, ne veut pas prendre un risque qu’elle a déjà pris dans le passé de viser trop grand, trop haut. Outre la masse de paperasserie administrative nécessaire pour ce genre de concert si on le fait dans une salle plus « publique », les autorités scrutent à fond le type d’œuvres qui seront jouée. Il lui est déjà arrivé (à la cheffe), lors d’un concert dans une salle « publique », de voir débarquer les autorités en plein milieu du concert (c’était aussi du Bach) et de le faire arrêter immédiatement pour prosélytisme religieux.

Personnellement, ce n’est pas l’aspect religieux qui me touche le plus dans les œuvres de Bach surtout que, sauf à avoir le livret sous les yeux (et encore, suivant les œuvres de musique classique dont on parle, il faut connaître l’allemand, l’italien, le latin, le russe ou…), je fait plus attention à la mélodie, la musique, l’harmonie qu’aux paroles elles-même (qui par le chant polyphonique sont parfois difficiles à percevoir).

Bon, à décharge, j’ai ouvert la partition de la Passion selon Saint Jean qui traînait sur le bureau de mon collègue et les parties Recitativ reprennent exactement les paroles de la Bible… mais de là à considérer un concert de Bach comme du prosélytisme religieux…