Depuis quelques temps et vivant où je vis pour le moment, je me demande ce qui distingue l’extrême-gauche (ici) et l’extrême- droite. Et je dois avouer que la distinction me semble très ténue. D’ailleurs plutôt que les demi-camembert qui représentent le plus souvent le spectre politique, je militerais (c’est un bien grand mot !) pour un cercle où les deux extrêmes se rejoignent.
Dans un article du journal Le Soir de ce 22 mai, je lis le résumé d’une analyse du programme électoral du Vlaams Belang
Nous avons notamment soumis le programme du Vlaams Belang au politologue de l’ULiège et spécialiste de l’extrême droite François Debras. Pour lui, trois éléments structurent traditionnellement les discours d’extrême droite : l’inégalitarisme, le nationalisme et le sécuritarisme. Trois caractéristiques que l’on retrouve au sein du programme 2024 du parti flamand. [..]
Plus largement, le terme coupole « extrême droite » repose sur deux valeurs communes : le nativisme (idéologie qui soutient qu’un Etat ne devrait être habité que par des membres de son groupe d’origine, NDLR) et l’autoritarisme. Et il englobe deux grandes catégories : la droite extrême et la droite radicale populiste. Le parti flamand, tout comme le Rassemblement national français ou le PVV de Geert Wilders s’inscrit dans cette deuxième catégorie. Puisqu’il se plie au jeu des élections, il rentre de facto dans le champ démocratique, à l’inverse de partis comme Aube dorée en Grèce.
Le nationalisme est clairement dans le discours du Chef suprême ici et est rappelé quasiment chaque jour. Ce pays est le plus beau, le plus grand et doit le rester (ou le devenir). Cela se voit clairement avec les revendications sur la petite île. Cela se voit également avec les pressions que subissent les expats de ce pays (même après plusieurs générations dans un autre pays : d’origine chinoise = toujours chinois et donc toujours au service de l’État, sous-entendu du Parti).
Le sécuritarisme, s’il n’est pas présent dans ce pays-ci, alors je ne sais pas de quoi il s’agit et je ne sais pas ce qu’on veut de plus (sauf peut-être la folie du petit État voisin au nord-est d’ici) : armée imposante et budget militaire correspondant, surveillance constante de la population par tous les moyens technologiques actuels (sans oublier les moyens humains avec les rapports mensuels que les citoyens en contact avec des « étrangers » doivent faire), etc.
Le nativisme… J’ai déjà eu l’occasion de l’aborder dans ces pages : il y a une très claire acculturation des ethnies minoritaires au profit d’une seule (ethnie Han). Ce n’est pas toujours aussi flagrant que dans les provinces occidentales (le Toit du Monde et la province où sont fabriqués par une ethnie « musulmane »* nos meilleurs vêtements de fast fashion) mais c’est le cas pour tous les groupes ethniques (j’en ai parlé ici pour la Mongolie intérieure). Il leur reste juste le folklore.
L’autoritarisme… Dois-je encore le présenter ?
Il y a peut-être juste l’inégalitarisme qui pourrait distinguer les deux extrêmes. Mais ici encore, il y a le Parti et ses membres et puis les autres… Et les grandes campagnes anti-corruption ne rendent pas plus égalitaires les accès aux bonnes écoles, aux bons emplois ou aux emplois dans l’administration. L’inégalitarisme entre femmes et hommes est très présent également comme je l’ai déjà souligné.
Historiquement, la gauche (extrême ou pas) tend à lutter contre le capitalisme et ses dérives et tend à avoir une politique sociale pour soutenir les travailleurs. Or, je l’ai, je crois, amplement montré dans ces pages, ce pays offre un capitalisme à outrance depuis la « libéralisation » de l’économie dans les années 80 et les acquis sociaux sont assez minimes et inégalitaires : retraite à 60 ans (ça fait rêver non ?), tickets de soins gratuits dans les hôpitaux publiques (de qualité très diverse), … mais pas vraiment de soutien à l’éducation, au chômage, … J’en reparlerai.
Dans nos sociétés occidentale, la violence des mouvements extrêmes est différente (lors des manifestations par exemple) : quand l’extrême gauche est violente, c’est d’abord sur des biens, soit publics et donc représentant l’État, soit privés représentant le capitalisme et l’ultra-libéralisme, soit encore contre les forces de l’ordre représentant la violence d’État qu’elle s’inscrit ; quand l’extrême droite est violente, c’est pour tabasser l’étranger, la communauté LGBTQI+, donc des personnes, donc à travers elles des idées, une idéologie. Où se situe la violence dans ce pays-ci ? J’aurais tendance à dire dans l’idéologie (faire violences aux personnes qui ne pensent pas selon la ligne du Parti), ce qui serait propre à une extrême-droite…
À la lumière de ceci, suis-je vraiment dans un pays qui entre dans le champ de l’extrême gauche ? Il semble que plusieurs États qui se revendiquent communistes, à commencer par l’URSS de Staline, ont opéré une instrumentalisation et un détournement complet des idées d’extrême gauche pour créer des régimes autoritaires bien loin voire même à l’exact opposé des théories d’origine.
- * Je mets des guillemets à « musulmane » car je ne sais pas ce qui leur reste encore de cette culture et religion après de nombreuses années de brimade.